Réflexions, spiritualité, coups de coeur... Poète et prophète sévissant sur Internet, le Moineau se réclame du Christianisme social et du Carrefour de Chrétiens Inclusifs, et ne demande l'autorisation de personne pour proclamer la bonne nouvelle de l'amour de Dieu révélé en Jésus Christ pour tous et toutes sans exception.

mardi 31 août 2010

Destination


Mais moi
je t'aime de toute ma maladresse.

Mais moi,
le narcisse des petits soirs fragiles,
moi sclérosée de toutes mes douleurs,
qui parle et parle sans fond dans les plaines,
et qui ne t'entend pas,
mais moi toute de moi,
et dans le doute et les incertitudes et les fumisteries
dans la fêlure, toujours,
mais moi, prenant toute ma place, toute ta place, tous les espaces pour les remplir de bruit pour ne pas sentir la faille, moi prenant, prenant, consommant, remplissant, me remplissant, te saoulant, jusqu'au fond, précipitée, et me sentant si vide
mais moi toute de décombres,
moi de mes blessures et de mes gouffres,
toute de moi
incapable,
mais moi, je voudrais, pourtant, être l'instrument du silence dans lequel Dieu viendrait te recueillir.

Apprendre de lente patiente, apprendre à prier,
dès lors que ce que je ne pourrais jamais de moi-même accomplir,
il est bon que cela me soit donné par grâce,
comme sont données les robes de lys des champs,
et les grands cris de joie qui montent au cœur des filles.
Que je sois légère, que je sois sauvée, afin de ne plus être encombrée de moi-même,
Que cela me soit donné, oui, cela, la transparence, enfin,
pour que je t'écoute
et que je grave la Parole sur le pli de ton poignet
là où se perdent les baisers, les rêves, les morsures,
et que devines à travers tout le souffle infiniment tendre de Dieu.

Me faire porte ouverte sur tes mondes intérieurs à la ligne d'horizon de tes tempêtes
Pour toi, pour toi,
Décimer les frelons qui te piquent l'échine
Et quand vient l'heure la plus sombre, la plus inquiète,
au mitan de ta nuit, t'écorcer de chaud et de coton doux
T'entendre, t'entendre vraiment
A travers les mains généreuses du Dieu qui t'a donné à moi,
avec ton beau visage unique de lumière,
et te voir enfin,
toi,
mon frère, ma sœur.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est littérairement très beau, comme toujours, mais je conteste un point:

D'être sauvé n'implique pas forcément un devenir léger.

La conscience grandissante de ce que signifiait d'être au bénéfice de la Grâce n'a pas eu pour effet de m'amincir ni de me rendre moins maladroit. Je rasais les murs et souhaitant être invisible, et voilà que Dieu a donné un sens, une consistance et donc du poids à mon existence. Qui suis-je pour lui prescrire de ne rayonner qu'à travers des être transparents, absents.

Paulo comme le Bouddha ont déjà constaté que le moi n'étais jamais aussi omniprésent et encombrant que quand il souhaite ne pas être là, ne pas s'imposer, ne pas encombrer, ne pas gêner, ne pas déranger (préoccupations très suisses). ne pas être un existant..

Or le Créateur ne destine pas ses enfants au néant. Au contraire, il donne du poids à mon existence. Par là, je suis motivé à tirer le meilleur parti de ma complexion physique et morale.

Le Moineau a dit…

Merci cher commentateur anonyme, voilà un commentaire qui invite à aller plus loin.
Mais je vous objecterais que l'on peut prier pour avoir un moi moins encombrant (même si , comme vous le montrez fort justement, une telle prière fait déjà montre d'un moi bien encombrant et encombré... et est dès lors, si j'ose dire, une prière qui se mord la queue).
Certes nous sommes invités à tirer parti de ce que nous sommes... Mais est-ce incompatible avec prier pour une certaine "transparence", demander la force de parfois savoir s'effacer?

Ne pas le faire bien qu'on en ressente le besoin ou le désir, serait selon moi un peu comme renoncer à prier pour devenir un "être de paix" sous prétexte que nous avons tous du belliqueux en nous et qu'il faut "faire avec".

Quant au fond de ce texte, mais peut-être n'est-il pas clair, il pparle de s'effacer non pour le plaisir de s'effacer, mais pour laisser place à l'autre.
Je pense que parfois, et plus souvent qu'on ne veut le dire dans nos sociétés, il faut vraiment laisser place à autrui. La logique de "l'épanouissement personnel" occulte une vérité simple : on n'entend jamais si bien son prochain que quand on se tait pour l'écouter. Et parfois, ne vous en déplaise, se taire s'est se faire plus transparent, se mettre entre parenthèses, non par soucis de "ne pas déranger" mais pour laisser advenir l'autre.
Et certainement pas pour être "absent" mais pour au contraire tenter de trouver une meilleure qualité de présence, à soi, aux autres, et à Dieu.